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L’Encyclopédie de De Bruyne : mensonges et perfidie (10)

 

La « collaboration » selon Léon Degrelle

 

« Débouté dans ses tentatives [de jouer un rôle politique de premier plan], la Collaboration lui semble la seule issue possible pour arriver à ses fins. Il s’y résout lors d’un meeting à Liège (05.01.1941 – suite à l’éditorial du Pays Réel du 1er janvier 1941, ponctué par le salut hitlérien) au cours duquel il lance de nouveau un vibrant Heil Hitler (alors qu’en octobre 1939 il avait formellement interdit le salut hitlérien). »

 

Le goût de l’ellipse confine à la dissimulation et au mensonge par omission chez un De Bruyne que son empressement à établir ses contre-vérités brouille avec la grammaire la plus élémentaire (ignorance des règles régissant l’épithète détachée) et même avec le vocabulaire (seul l’électeur a « débouté » –tout provisoirement– Léon Degrelle de ses prétentions politiques en 1937 ; par contre, en 1940, Léon Degrelle eût certes apprécié avoir affaire à la vraie justice avant d’être arrêté, mis au secret, déporté et torturé !)…

 

 48 P.E. Janson 1937.jpgÀ sa libération des prisons françaises, Léon Degrelle n’a pas imaginé un seul instant « jouer un rôle politique de premier plan » hors de la « Collaboration », c’est-à-dire de la mise en œuvre de l’ordre nouveau national-socialiste rejoignant l’idéal rexiste. Avant même de rentrer à Bruxelles, il rencontre à Paris son ami, l’ambassadeur Otto Abetz (avec d’ailleurs les encouragements écrits de Paul-Emile Janson, le ministre de la Justice responsable de ses avanies !) pour évoquer l’avenir de la Belgique bourguignonne dans le nouvel ordre européen. Il retournera encore à Paris en août pour poursuivre ses discussions, cette fois en compagnie d’Henri De Man.

 

Il faut souligner que la « Collaboration » semblait surtout « la seule issue possible » pour tous les politiciens éparpillés du gouvernement belge. Et une collaboration autrement totale que celle de Léon Degrelle envisageant un nouveau destin historique pour la Belgique bourguignonne aux côtés du Reich, puisque le Premier ministre Hubert Pierlot en personne voyait son pays englobé dans le Reich et gouverné par un « Gauleiter » : « En ce qui concerne l’avenir de la Belgique, le Gouvernement ne sait pas ce que sera le Traité de Paix. Le plus favorable serait que la Belgique continuât, avec une indépendance relative, englobée dans un Zollverein [union douanière] ayant à sa tête un Gauleiter. » (lettre du 18 juillet 1940 du Premier ministre Pierlot au vice-président du Sénat belge, Daniel Leyniers).

 

49 Spaak Lisbonne.jpgBien plus, même réfugiés à Londres, les ministres belges encouragèrent les hommes d’affaires restés au pays à collaborer économiquement avec les autorités allemandes, même si cela contribuait à leur effort de guerre ! Juste après la guerre, en décembre 1946, La Libre Belgique a publié ce qu’elle a appelé les « Documents de Lisbonne », c’est-à-dire la correspondance envoyée par les ministres londoniens aux grands responsables économiques belges, dont les dirigeants de la banque de la Société Générale, les enjoignant de « collaborer ». C’est ainsi, par exemple, que le ministre des Finances, Camille Gutt, écrivait à Félicien Cattier, proche collaborateur du gouverneur de la Société Générale, le 22 février 1941 : « Mais je sais très bien qu’aujourd’hui, presque tout matériel est du matériel de guerre ou en connexion avec la guerre et que c’est l’acheteur qui choisit et non le vendeur. C’est vous dire que je comprends (et quand je dis “je”, cela représente également mes collègues qui sont d’accord avec moi sur tous les points) parfaitement votre position ».

 

La collaboration degrellienne se situait à un tout autre niveau, géopolitique et idéologique. Adolf Hitler y était d’ailleurs tout disposé, lui qui, au retour de ses rencontres avec Franco, à Hendaye, et avec Pétain, à Montoire, avait prévu de rencontrer Léon Degrelle le 26 octobre 1940 à Yvoir –en Belgique donc où il avait installé son quartier-général pour la bataille de France. Il devait ensuite voir Henri De Man (étonnamment absent de l’Encyclopédie de De Bruyne !), président du Parti Ouvrier Belge (futur Parti socialiste) acquis à l’ordre nouveau et proche du roi, et finalement, afin de finaliser les décisions résultant de ces rencontres, le 27 octobre, le roi Léopold III. On sait que ce rendez-vous crucial fut annulé à cause de l’entrée en guerre de l’Italie contre la Grèce.

 

Et comment sait-on que le Führer était acquis aux perspectives de Léon Degrelle échafaudées chez Otto Abetz en compagnie de Henri De Man ? Par la propre sœur de Léopold III, la princesse Marie-José, épouse du prince héritier Umberto d’Italie, venue à Berchtesgaden le 17 octobre 1940, solliciter un rendez-vous pour son frère auprès du Führer. Elle racontera elle-même que le chancelier du IIIe Reich était acquis à l’idée que la Belgique soit agrandie afin de former une « Nouvelle Bourgogne ». A la fin de la guerre, Heinrich Himmler confirmera encore ces perspectives en précisant que ce serait bien Léon Degrelle qui en serait le premier chancelier (voir ce blog au 20 mai 2016).

 

50 Léopold Berchtesgaden.jpgOn voit donc parfaitement que le discours du 5 janvier 1941 ponctué par son Heil Hitler ! ne marque nullement, pour Léon Degrelle, la résolution, faute de mieux, de collaborer avec Adolf Hitler. Dans son chef, comme il le raconta lui-même, il s’agissait, deux mois après le rendez-vous raté d’Yvoir, de se rappeler au bon souvenir du Führer pour réorganiser politiquement la Belgique dans l’ordre nouveau européen : « Quant à nous, à voir l’immobilisme des Allemands, nous ne nous risquions qu’avec inquiétude à intervenir. […] J’ai essayé tout juste en janvier 1941, dans un article du Pays réel et à Liège dans un grand meeting, de lancer un “Heil Hitler” dans l’espoir de réveiller l’arbitre de Berchtesgaden. Mais Hitler, à ce moment-là, était déjà en plein dans ses préparatifs de la campagne de Russie. Il avait d’autres chats à fouetter que les chats belges. » (Jean-Michel Charlier, Léon Degrelle : persiste et signe).

 

Terminons notre commentaire en soulignant la totale imbécillité de la remarque finale, véritable coup de pied de l’âne De Bruyne essayant à toute force d’établir l’inconséquence de l’attitude d’un Léon Degrelle enfermé dans ses contradictions : « il lance de nouveau un vibrant Heil Hitler (alors qu’en octobre 1939 il avait formellement interdit le salut hitlérien) » !

 

51 Henri De Man Jam.jpgComme si le Heil Hitler de janvier 1941 pouvait avoir quoi que ce soit à voir avec quelque interdiction de « salut hitlérien » de 1939, moment où Léon Degrelle et le mouvement Rex étaient pratiquement les seuls à défendre bec et ongles la politique de neutralité officiellement prônée par le roi et son gouvernement !

 
Entre ces deux dates, il y eut l’écroulement des ploutocraties et la victoire du national-socialisme en laquelle même le conseiller du roi Léopold III, Henri De Man (qui, lui aussi, en 1939, se croyait antihitlérien), voyait « une délivrance »  ! Estimant désormais que « la guerre a amené la débâcle du régime parlementaire et de la ploutocrratie capitaliste dans les soi-disant démocraties », il se réjouissait que la voie soit enfin « libre pour les deux causes qui résument les aspirations du peuple : la paix européenne et la justice sociale » ! (voir ce blog au 18 janvier 2016)

 

Le Heil Hitler de 1941 ponctue l’acte d’adhésion totale au national-socialisme offrant à l’Europe libérée un nouvel et exaltant destin : 

 

52 GazCharleroi 40 07 03 DeMan.jpg

« Ce sera l’œuvre suprême d’Hitler, de cet ouvrier, pauvre et méconnu, devenu le plus grand bâtisseur politique et social des temps modernes, de ce simple caporal qui balaya, de la Vistule à la Gironde, les plus prétentieux des généraux et des maréchaux, de ce conducteur de peuples, si extraordinairement complet : homme d’Etat, stratège, poète grandiose. Il a sauvé son pays, réorganisé l’Europe centrale, libéré la France de la tyrannie politicienne, ouvert à l’Occident des possibilités imprévues : demain, c’est l’Europe entière que son génie va modeler. Nous avons foi dans sa force et dans son humanité, dans la grandeur de ses projets et la poésie de ses rêves. Nous savons qu’il sera vainqueur et que l’Europe qui sortira de ses mains sera grandiose. A lui nos vœux, notre confiance, notre espérance : en sauvant l’Europe, il nous sauvera.

Heil Hitler ! »

 

 

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